Leur métier est aussi risqué que particulier, les grutiers passent leurs journées perchés à des dizaines de mètres de hauteur pour mener à bien de lourds chantiers. Nous avons été à la rencontre de Nabil, à 56 m de haut, dans la grue du chantier du Concorde. Le Lorientais nous raconte son quotidien.
« On est chez moi, c’est la petite cabine où je passe huit heures par jour ; heureusement, c’est chauffé », sourit Nabil Boudechiche. Le Lorientais de 40 ans est grutier depuis douze ans, « j’y suis arrivé un peu par hasard… J’étais au chômage après avoir travaillé dans la plomberie, les espaces verts. On m’a proposé cette formation et j’ai accepté. Aujourd’hui je ne saurais pas quoi faire d’autre », confie le grutier.
En ce moment, c’est sur le chantier du Concorde qu’il officie. Perché à 56 m de haut, la vue est imprenable à condition de ne pas avoir le vertige. Le chantier du Concorde, c’est le grand luxe, « Il y a un ascenseur pour aller jusqu’à la cabine, c’est la première fois que j’en ai un. Habituellement, on doit tout monter à l’échelle et ça prend dix minutes ». Pour un non initié, les 56 m sont déjà vertigineux mais Nabil a vu plus impressionnant, « J’ai travaillé sur la construction de l’hôpital du Scorff dans une grue de 70 m de haut. Ça, c’était un gros chantier », se remémore le grutier de la société SRB.
Quelques frayeurs
Le bureau de Nabil est particulier. Il n’est pas dérangé par ses camarades dans l’open space mais doit se contenter d’une cabine de tout juste 1 m², mais la vue vaut le coup : « Le matin, quand le soleil se lève, c’est très beau, je prends souvent des photos. C’est marrant, on découvre la ville différemment, on voit des choses que l’on n’imagine pas, des jolis jardins, de jolies terrasses ». Pas le temps néanmoins de se laisser gagner par l’horizon dégagé, le métier de grutier, c’est aussi beaucoup de stress, « Il y a quelques moments de panique, surtout quand il y a du vent, on est censés arrêter de travailler à 72 km/h mais souvent c’est par rafales et on peut vite être surpris. Un jour, il y a eu un gros coup de vent, je ne savais pas qu’un frein de la grue était défectueux et elle a complètement balancé, heureusement que j’étais accroché à un poids de 3 tonnes ».
Difficulté supplémentaire pour Nabil, le chantier du Concorde se situe à côté d’un immeuble d’habitation, « Là, on n’a pas le droit à l’erreur ». Le meilleur ami du grutier à 56 m de haut : le talkie-walkie et l’ingrédient indispensable au chantier : la confiance, « Il faut en avoir en ceux qui sont en bas et nous guident. Eux aussi doivent avoir confiance en nous parce que l’on manœuvre des charges au-dessus de leurs têtes. Nous sommes toujours très vigilants. On transporte aussi du matériel de la rue au chantier, il faut faire attention aux passants et aux voitures, c’est dangereux mais c’est ça, les chantiers de ville ».
Calme et précision
Les journées ne sont pas de tout repos et Nabil confie volontiers, « des maux de tête » en rentrant le soir, après des heures de concentration à regarder le vide. « C’est un métier pour lequel il faut être calme, c’est la principale qualité mais il faut aussi avoir une bonne vue et être minutieux ». La précision fait partie intégrante des missions des grutiers. Perchés à des dizaines de mètres de hauteur, ils doivent viser juste pour vider une benne, déplacer de la ferraille, des engins etc. « Parfois, on travaille presque à l’aveugle, derrière un mur, là on peut compter sur une caméra ou sur les autres », sourit Nabil.
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